Zoom sur un projet de recherche soutenu par l'association Ruban Rose
La mécanique finement huilée des cellules cancéreuses
Le traitement des cancers du sein métastatiques est, aujourd’hui encore, un défi majeur en cancérologie. D’un point de vue biologique, les cellules cancéreuses deviennent des métastases à la suite d’un parcours particulièrement complexe, au cours duquel il leur faut surmonter de nombreuses contraintes physiques. Et, bien malheureusement, force est de constater qu’elles y parviennent. Mais de quelle manière s’adaptent-elles ? Eléments de réponse avec Jacky Goetz, directeur de Recherche au Centre de Recherche en Biomédecine de Strasbourg et lauréat d’un Prix Ruban Rose Avenir en 2020.
Jacky Goetz, vos travaux de recherche sont focalisés sur la formation des métastases. Dans quel cadre médical et scientifique s’inscrivent-ils ?
Les métastases sont une réelle problématique de la prise en charge des cancers du sein : lorsqu’elles sont détectées, il est fréquent que le pronostic des patientes bascule. Il est donc capital et urgent de mieux les comprendre.L’intention première des soignants est, quand c’est possible, de prévenir leur apparition. A travers notre projet, nous souhaitons justement affiner nos connaissances du processus de formation des métastases. Parce que si nous mettons en lumière la cascade d’événements menant à leur genèse, nous serons très probablement en mesure de l’empêcher.
C’est pour cette raison que nous étudions les propriétés mécaniques des cellules cancéreuses. Le fait qu’elles s’adaptent à toutes les contraintes physiques qui s’opposent à elles pendant leur périple pour devenir des métastases semble jouer un rôle clé.
Comment définir ces « contraintes physiques » que subissent les cellules cancéreuses quand elles deviennent des métastases ?
Tout au long de ce parcours, les cellules cancéreuses font face à d’importantes entraves. A la manière d’un être humain qui enjambe, rampe et nage pour traverser une jungle, elles doivent faire preuve d’une grande adresse pour devenir des métastases.
Quel est donc l’objectif de votre projet soutenu par l’Association Ruban Rose ?
L’aptitude des cellules cancéreuses à s’adapter à toutes les contraintes physiques est tout bonnement déconcertante. Néanmoins, nous ne savons pas à quel point ces propriétés mécaniques sont importantes – ou non – dans le processus de formation des métastases.Nous pensons que les cellules cancéreuses sont en réalité capables d’ajuster leurs propriétés mécaniques avec une très grande finesse. Elles seraient à-même, en fonction des besoins, de réguler leur malléabilité, pour se déformer à volonté ou bien devenir beaucoup plus rigides. Mais quelles sont exactement les capacités physiques qui confèrent aux cellules cancéreuses le plus de facilités à former des métastases ? Toute l’ambition de notre projet est de répondre à cette question.
Par ailleurs, il est très probable que les propriétés mécaniques des cellules cancéreuses soient gouvernées au niveau génétique : nous souhaitons identifier les gènes potentiellement impliqués.
La connaissance de ces évènements génétiques nous guidera vers la découverte de nouvelles cibles thérapeutiques. A plus long terme, nous devrions être en mesure d’empêcher la formation des métastases.